Les prix des billets de concert s'envolent
Par Louise Blas – Chargée de veille & prospective à Plaine Images
Avec le comeback d’Oasis, la discussion sur les prix des billets de concert de stars internationales a repris de plus belle : le système de vente dynamique mis en place a fait décoller les prix, offusquant les fans face à des prix qui doublent en cours d’achat. En adaptant le prix des billets en direct face à la demande, cette méthode de vente applique cyniquement les règles d’un capitalisme débridé… et ça fonctionne : toutes les places ont été vendues en 10h, malgré la polémique. Cette pratique, encore peu répandue en France, est courante aux Etats-Unis. Elle vaut à Live Nation une plainte du Département de la Justice américaine pour ses pratiques, après le scandale des prix fous de la tournée de Taylor Swift en 2022.
L’hyper inflation des billets de concert poursuit donc sa course folle depuis la fin de la pandémie, et n’est pas prête de s’arrêter. Le rattrapage des revenus non gagnés pendant la pandémie et l’inflation ont bon dos : une étude de Pollstar commandée par le Wall Street Journal montre que la hausse est surcompensée. Comme relevé dans cet article qui dresse un panorama juste de la situation, la concentration du marché autour d’une poignée d’artistes bankables, la situation monopolistique de Ticketmaster sur la vente de billets et la mainmise de Live Nation sur les plus grosses tournées et festivals pipent les dés. Un détail qui a son importance : les deux poids lourds ont fusionné en 2020 pour donner naissance à Live Nation Entertainment.
Comment contrer cette course folle ?
Des solutions existent si on veut contrer cette course, mais encore faut-il de la volonté et une vraie connivence entre les artistes, les producteurs et les spectateurs. Plusieurs illustrations récentes montrent que les artistes peuvent par exemple imposer leurs règles. A l’instar du groupe Indochine, qui s’exprime régulièrement sur sa volonté de garder ses billets de concert accessibles au grand nombre, et dit refuser la pression des producteurs. Le leader de The Cure a également pris à partie Ticketmaster pour qu’ils remboursent aux fans une partie des frais d’achat de billet de la tournée américaine. Aux plus abordables des tickets (20$), s’ajoutaient 11$ de commission de service, 10$ de frais d’établissement et 5,5$ de frais de traitement de commande, pour un total de 46,5$.
Lorsque la demande dépasse l’offre, d’autres solutions sont envisageables : la loi du « premier arrivé, premier servi » fonctionne toujours, même si cela demande aux plateformes de vente d’avoir les reins solides pour supporter le flux de connexion (reproche très régulièrement fait lors de grandes dates). Les Jeux Olympiques de Paris 2024 ont par exemple mis en place un tirage au sort.
Quant au public, on peut évidemment s’interroger sur la capacité à dépenser de telles sommes. En alternatives ? Refuser de faire des concerts qui dépassent un certain prix psychologique, ouvrir son horizon vers des artistes moins cotés mais tout aussi pourvoyeurs d’émotions et retrouver du plaisir à découvrir et soutenir, plutôt que d’accepter ses règles du jeu cavalières.
A quand un acteur tech qui s’emparera du problème pour proposer une solution qui redonnera du pouvoir aux artistes et aux fans ?